19. mars 2021

Communiqué de presse

Stratégie vis-à-vis de la Chine : le Conseil fédéral exprime quelques inquiétudes mais aucune conséquence

Dans sa stratégie politique vis-à-vis de la Chine pour la période 2021-2024, le Conseil fédéral fixe pour la première fois un cadre d’orientation clair. Il ne fournit toutefois aucune alternative au principe du « changement par le commerce » pourtant clairement défaillant. Par conséquent, la Société pour les peuples menacés (SPM) demande des mesures concrètes visant à l’adoption d’une politique des droits humains cohérente et à concilier en particulier économie et droits humains. Il convient également de s’attaquer de manière concrète aux enjeux de politique de sécurité tels que la protection des droits fondamentaux des communautés issues des diasporas en Suisse.

Dans sa stratégie politique vis-à-vis de la Chine dévoilée aujourd’hui au public, le Conseil fédéral fixe pour la première fois un cadre d’orientation clair. La SPM salue la volonté de renforcer la coordination entre les parties impliquées et de développer des compétences spécifiques à la question chinoise de manière ciblée. La création d’une commission de coordination constitue un pas dans la bonne direction.

Aucune réponse quant aux incertitudes croissantes

L’interdépendance économique étroite entre la Suisse et la Chine s’est accrue ces dernières années : la Chine est le troisième partenaire commercial de la Suisse. Dans le même temps, la situation en matière de droits humains en Chine s’est considérablement aggravée. « Dans le secteur économique en particulier, il faut une gestion uniforme des violations des droits humains qui, dans la province chinoise du Xinjiang par exemple, dépassent l’entendement et s’apparentent aujourd’hui à un génocide », déclare Angela Mattli, responsable de campagne à la SPM.

« Jusqu’à présent, le principe du ’’changement par le commerce’’ ainsi que le dialogue avec la Chine sur les droits humains ont été utilisés comme une excuse pour exclure cette question des relations économiques », ajoute Angela Mattli. L’accord de libre-échange entre la Suisse et la Chine n’offre, par exemple, absolument aucun moyen d’empêcher l’importation de produits dont la fabrication est liée à de graves violations des droits humains. Or, les concessions floues de la stratégie politique actuelle de la Suisse vis-à-vis de la Chine montrent que le principe évoqué plus haut est un échec. Une nouvelle alternative à long terme fait cependant défaut. « La stratégie actuelle vis-à-vis de la Chine ne contient aucune mesure contraignante permettant une politique des droits humains cohérente », poursuit Angela Mattli.

Les instruments sont là, mais la volonté politique fait défaut

Ainsi, des mesures telles qu’un contrôle de diligence contraignant en cas d’investissements risqués, d’importations de biens et de services au risque que ces derniers soient issus du travail forcé et en cas d’exportations vers la province du Xinjiang, notamment dans le secteur de l’industrie des machines, sont totalement absentes de la stratégie de la Suisse vis-à-vis de la Chine. Cette apparente impuissance à concilier économie et droits humains est d’autant plus incompréhensible que le Conseil fédéral dispose depuis longtemps d’instruments adéquats : les principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme ainsi que les principes directeurs de l’OCDE sur les multinationales sont inclus dans la stratégie de politique extérieure 2020–2023, et le Plan d’action national « Entreprises et droits de l’homme » 2020- 2023 prévoit un catalogue complet de mesures. Et pourtant, ces instruments ne sont mentionnés nulle part dans la stratégie politique vis-à-vis de la Chine.

Par ailleurs, « toutes les formes d’interventions diplomatiques, y compris les sanctions, font aussi partie d’une politique cohérente extérieure », déclare Lisa Mazzone, présidente de la SPM. « La SPM déplore qu’au-delà du dialogue et des critiques édulcorées, aucune sanction d’aucune sorte ne soit envisagée dans la stratégie politique de la Suisse vis-à-vis de la Chine, ce qui pose problème au regard de la situation dramatique en matière de droits humains en Chine. »

Garantir la sécurité et les droits fondamentaux en Suisse

Dans sa stratégie politique vis-à-vis de la Chine, le Conseil fédéral reconnaît toutefois le danger que représente la Chine par rapport aux questions de politique de sécurité et encourage les mesures visant à empêcher les activités d’espionnage et de tentatives d’influence exercées par le gouvernement chinois en Suisse. La menace accrue que constitue la Chine est également illustrée de manière saisissante dans le tout dernier rapport du Service de renseignement de la Confédération. Cela montre que les droits fondamentaux de la population suisse doivent être mieux protégés. Notamment à l’égard des communautés ouïghoure et tibétaine, particulièrement concernées.

Revendications adressées au Conseil fédéral

Pour les raisons évoquées précédemment, la SPM adresse au Conseil fédéral les revendications suivantes :

  • Concilier économie et droits humains
    Les principes directeurs de l’ONU relatifs aux entreprises et aux droits de l’homme, les principes directeurs de l’OCDE sur les multinationales ainsi que les directives contenues dans le Plan d’action national « Entreprises et droits de l’homme » 2020-2023 doivent s’appliquer aussi à la Chine. Les plus de 1000 entreprises suisses actives en Chine doivent au plus vite être sensibilisées à leur responsabilité vis-à-vis des droits humains et contraintes à effectuer des contrôles de diligence. La compréhension à l’égard d’une politique budgétaire durable, formulée dans la stratégie vis-à-vis de la Chine, doit être globale et comporter des aspects portant sur la dimension sociale et les droits humains. Les entreprises suisses qui traitent avec la Chine, au détriment des droits humains, doivent être sanctionnées.
  • Diplomatie et sanctions
    La SPM attend du Conseil fédéral qu’il n’hésite pas à émettre clairement des critiques voire à prendre des sanctions à l’égard de l’ensemble des acteurs impliqués dans de graves violations des droits humains, y compris les interdictions pour ces acteurs d’entrer en Suisse et le gel de leurs actifs sur le territoire.
  • Surveillance et influence
    La SPM demande des mesures concrètes pour protéger les droits fondamentaux en Suisse, en particulier vis-à-vis des communautés ouïghoure et tibétaine.
  • Coopération et coordination accrues avec l’UE
    La Suisse doit intensifier ses efforts pour bâtir avec l’UE des alliances sur les questions de droits humains et rechercher une coordination avec cette dernière. Le pays doit notamment participer aux sanctions éventuelles prévues par l’UE.

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