11. juillet 2022

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Mégaprojet Ferrogrão en Amazonie : une étape de plus dans un processus douteux

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La confusion continue de régner autour du mégaprojet Ferrogrão au Brésil : pour la réalisation de la ligne ferroviaire destinée à transporter le soja à travers l’Amazonie, le ministère des Infrastructures du Brésil n’a trouvé qu’une seule entreprise candidate. La raison est sans doute due aux obstacles juridiques importants liés à la construction de la voie, qui traverserait des réserves naturelles protégées et des territoires autochtones.

A ce jour, seule une entreprise s’est portée candidate pour la construction de la ligne ferroviaire Ferrogrão qui doit traverser l’Amazonie brésilienne du nord au sud. Malgré le roadshow organisé à l’automne 2021, les entreprises internationales potentiellement candidates ont préféré s’abstenir. Le ministère des Infrastructures du Brésil (MInfra) a dû se contenter de l’entreprise nationale Zion Real Estate Ltd. dont il a officiellement accepté la proposition de réalisation du mégaprojet en janvier dernier. Reste à savoir si l’entreprise concernée sera à la hauteur d’un projet de cette nature et de cette envergure. Car en temps normal, celle-ci opère dans le domaine de la construction de logements et elle ne justifie par ailleurs d’aucune expérience dans la construction ferroviaire. Sur son site Internet inachevé figurent quelques projets de construction d’infrastructures de petite taille dans le domaine agricole.

Le mégaprojet Ferrogrão prévoit la construction d’une ligne ferroviaire de 933 kilomètres de long, censée faciliter l’acheminement du soja depuis l’intérieur des terres au Brésil vers les ports internationaux. Depuis son lancement en 2012, le projet fait l’objet de vives critiques de la part d’organisations non gouvernementales. Selon les plans prévus, la pose des voies nécessiterait de déplacer les frontières du parc national de Jamanxim. En outre, le projet menacerait l’espace de vie d’au moins 19 communautés autochtones. Or, aucune d’entre elles ne fut intégrée au processus d’octroi des licences nécessaires. En conséquence, la Chambre des populations autochtones et communautés traditionnelles du Ministère public fédéral a demandé la tenue d’une consultation avec les communautés concernées, afin que le droit au consentement libre, préalable et éclairé (CLPE) soit respecté. Suite à cette objection, le projet est suspendu provisoirement depuis mars 2021, et à la mi-juin 2022, la décision judiciaire a une nouvelle fois été repoussée.

Des lois environnementales fragilisées

Pour la journaliste brésilienne Telma Monteiro, qui écrit sur les projets d’infrastructure en Amazonie, cette incertitude juridique constitue l’une des deux raisons principales du désintérêt des entreprises internationales pour le projet. Durant le mandat du ministre brésilien de l’environnement, Ricardo de Salles, de 2019 à 2021, pendant le premier terme du gouvernement Bolsonaro, bon nombre de lois environnementales ont été assouplies et l’autorité nationale en charge de l’environnement (IBAMA) a été affaiblie. Les pratiques de Ricardo de Salles ont été lourdement condamnées par plusieurs pays importants de l’économie mondiale. Cette situation d’incertitude juridique totale et de risques potentiels ont découragé les investisseurs. Par ailleurs, les problèmes dans le domaine de la protection de l’environnement et celui des droits humains doivent être réglés afin que la ligne ferroviaire Ferrogrão puisse être effectivement construite.

Une autre raison du désintérêt pour le projet peut être attribuée à la campagne anti-corruption du gouvernement de Dilma Rousseff menée en 2012 au Brésil. Suite à la condamnation de nombreux grands industriels qui siégeaient par ailleurs au sein du gouvernement brésilien, les entreprises susceptibles de gérer un mégaprojet tel que le Ferrogrão ont également disparu.

Enfin, il est important de souligner que derrière l’entreprise Zion retenue se trouvent des partenaires et des client·e·s qui ont soutenu activement la campagne électorale de l’actuel président Jair Bolsonaro. Le contexte qui entoure la candidature de cette entreprise reste opaque. Dans l’attente de la décision du tribunal sur le projet, l’espoir est encore permis pour les communautés autochtones concernées.

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