Il y a 25 ans, la guerre a chassé Mary Jeyaseelan de sa maison. D’origine tamoule, elle vivait sur l’île Iranaitivu au nord du Sri Lanka. Bien que la guerre se soit terminée il y a neuf ans, la marine sri-lankaise continue d’occuper cette île et s’en sert comme base militaire. Invitée par la SPM, la femme de 55 ans est venue en visite en Suisse au mois de mars dernier, afin de témoigner de l’accaparement des terres devant le Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. Mary Jeyaseelan a manifesté inlassablement pour pouvoir retourner sur son île bien-aimée. Avec succès : A la mi-mai, la marine a finalement rendu l’Iranaitivu aux habitants.
[ Note de la rédaction : L’interview a eu lieu en mars 2018. Le 14 mai 2018, la marine sri-lankaise a rendu l’ île aux gens de Iranaitivu. Cela permettra aux gens de pêcher et de récolter à nouveau des fruits de mer et, enfin, d’avoir accès à une source de revenu sûre. La joie de la communauté villageoise est énorme. « Nous remercions la SPM pour son soutien. Grâce à l’aide du SPM et d’autres organisations, nous sommes devenus une communauté forte et nous avons pu nous battre pour notre pays. Cela n’aurait pas été possible sans soutien », dit Mary Jeyaseelan après le retour au téléphone. La SPM est également très heureuse et félicite les habitants pour leur succès. ]
Mary Jeyaseelan, comment votre quotidien a-t-il changé depuis votre fuite d’Iranaitivu ?
Notre vie est devenue très difficile. A Iranaitivu, je m’occupais de nos moutons et de nos vaches, je cultivais des noix de coco et j’élevais des crevettes. Je ne peux plus le faire sur le continent. C’est le sort de beaucoup de femmes de ma communauté. Nous sommes maintenant devenues pour ainsi dire exclusivement dépendantes du salaire de nos maris. C’est pour cela qu’aujourd’hui, la plupart des familles vivent dans la pauvreté.
Il y a plus d’un an, vous avez lancé une action pour pouvoir retourner vivre sur votre île. Comment est né ce projet ?
Comme nous ne pouvons supporter plus longtemps cette situation, nous, les femmes, avons décidé de nous battre pour pouvoir rentrer chez nous. Nous avons démarré une action le 1er mai 2017 qui ne s’est jamais arrêtée. Nous avons choisi cette date car il s’agit aussi d’un conflit de travail, nous avons perdu notre source de revenus.
Quelles actions entreprenez-vous concrètement ?
Nous avons installé nos quartiers dans la région côtière. Aujourd’hui, 25 à 50 personnes sont sur place en permanence. Nous avons déposé des pétitions et avons pris contact avec plusieurs organisations, dont la vôtre. La SPM nous soutient, elle a organisé des ateliers et nous a mises en relation avec d’autres communautés qui se battent pour leurs droits. Ceci nous motive à persister dans notre lutte pour retourner sur notre île.