15. novembre 2024
Actualité
Joint-Ventures d'UBS en Chine : le profit au détriment des Ouïghour·e·s
Un article du journal Finanz und Wirtschaft rapporte que des joint-ventures d’UBS détiennent et négocient des actions de l’entreprise chinoise Hikvision, qui est fortement impliquée dans les violations des droits humains dans la région du Turkestan oriental (province chinoise du Xinjiang). En 2020, la SPM avait déposé une plainte contre UBS en raison de sa participation à Hikvision. Il s’avère qu’actuellement, deux joint-ventures d’UBS avec des entreprises d’Etat chinoises continuent d’investir dans l’entreprise sanctionnée par les États-Unis. La SPM exige que des garanties en matière de droits humains soient posées dans le cadre de cette coopération financière.
L’entreprise Hikvision est particulièrement impliquée dans la surveillance de masse des Ouïghour·e·s et dans l’organisation brutale des camps dans la région du Turkestan oriental : elle a conclu des contrats de plusieurs centaines de millions de dollars avec les autorités de sécurité locale et joue un rôle clé en matière de technologie de surveillance à l’intérieur et en dehors des « camps de rééducation ». En 2020, la SPM avait déposé une plainte auprès du Point de contact national (PCN) pour les Principes directeurs de l’OCDE sur les multinationales, parce qu’UBS avait pris une participation dans Hikvision par le biais du fonds chinois du prestataire de services financiers MSCI. Certes, Hikvision a été exclu du fonds par MSCI en raison des sanctions américaines durant les discussions entre la SPM et UBS. « Mais UBS ne s’est absolument pas montrée prête à endosser une quelconque responsabilité, c’est pourquoi nous avons cessé tous les entretiens », explique Selina Morell, responsable du programme Chine chez la SPM.
Le nouvel article du Finanz und Wirtschaft révèle que même si l’UBS ne participe plus directement à Hikvision, deux joint-ventures de la grande banque suisse avec des entreprises d’Etat chinoises investissent dans le fournisseur de technologies de surveillance. « UBS veut clairement tirer profit du marché lucratif en Chine. Elle ne se distancie toujours pas de Hikvision », prévient Selina Morell.
Risques élevés des joint ventures
Le cas récent de VW a montré que les joint ventures en Chine comportaient des risques élevés : l’entreprise investit dans une usine du Turkestan oriental bien que, selon divers cabinets d’audit renommés, il n’est plus possible d’y réaliser des audits indépendants et fiables. Le fabricant automobile a dû faire face à une violente critique internationale durant plusieurs mois. VW a rejeté toute responsabilité, arguant que sa participation était inférieure à 50 % et qu’elle n’avait ainsi que peu de marge de manœuvre. « La scène internationale et les investisseurs·euses n’ont toutefois pas été convaincu·e·s », souligne Selina Morell.
Les activités d’UBS en Chine sont notamment soutenues par la Suisse officielle : parallèlement à l’accord de libre-échange existant, la Suisse veut intensifier les relations financières entre les deux pays. Depuis 2013, la Suisse et la Chine entretiennent des discussions financières privilégiées visant la construction d’un accord bilatéral en matière de finances. A l’occasion d’une visite officielle en Chine du conseiller fédéral Ueli Maurer en 2019, ces relations ont été intensifiées, et des rencontres ont régulièrement été organisées sur la coopération des marchés financiers, avec la participation de la branche financière suisse.
« Pour nous, ce n’était qu’une question de temps pour que les activités d’UBS en Chine ne fassent l’objet de gros titres négatifs », assure Selina Morell. Après des entretiens infructueux avec UBS, elle en appelle à la responsabilité de la sphère politique suisse : « Nous exigeons que les relations commerciales et financières avec la Chine ne puissent être élargies qu’à condition que les droits humains y soient intégrés. »