25. juin 2018

Communiqué de presse

La signature de cet accord, donne un signal erroné et dangereux

Aujourd’hui la Suisse va signer l’accord « modernisé »de libre-échange (ALE) avec la Turquie, dans le cadre de l’Association européenne de libre-échange (AELE). Celle-ci envoie par là un signal à l’heure actuelle totalement erroné. Il appartient maintenant au Parlement de renoncer pour l’instant à une ratification.

Des élections anticipées viennent de se tenir hier en Turquie. Elles se sont déroulées dans un contexte très difficile. Depuis la tentative de putsch de juillet 2016, le pays se trouve en état d’urgence. Le président Erdogan le dirige à coups de décrets d’urgence. Ces derniers ont entraîné le licenciement d’environ 150 000 employé(e)s de l’État et l’incarcération d’environ 160 000 citoyen(ne), dont de nombreux membres et responsables publics de l’opposition, des représentant(e)s de minorités et des syndicalistes. Dans des rapports détaillés, le Haut-Commissaire des droits de l’homme aux Nations Unies et le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la torture se montrent très inquiets de la situation dans ce pays.

Les organisations cosignataires du présent communiqué de presse ont fait observer il y a des mois déjà qu’à l’heure actuelle, la modernisation de l’ALE est un signal erroné. C’est d’autant plus vrai après les nouveaux développements connus, comme la tentative d’enlèvement d’un homme d’affaires zurichois par des collaborateurs de l’ambassade de Turquie, et en particulier l’invasion, illégale au regard du droit international, du nord de la Syrie par la Turquie, que le Parlement suisse a fermement condamnée. En outre, face au dommage causé, selon une lecture « officielle », on ne voit guère d’utilité économique importante à cette signature. Les cas d’arbitraire judiciaire et une politique économique catastrophique ont eu pour effet que les entrepreneurs et entrepreneuses ainsi que les investisseurs et investisseuses suisses commencent toujours plus à éviter la Turquie.

L’ALE modernisé contient désormais un chapitre sur le « développement durable » qui postule le respect des droits humains et des normes sociales et environnementales internationales. Dans des circonstances normales, un tel chapitre serait à saluer. Mais en signant cet ALE, l’AELE atteste dans les faits que le régime turc respecte aujourd’hui totalement les droits humains et est prêt à le faire également à l’avenir. Ce n’est pas là uniquement un affront pour la population civile victime du despotisme d’Erdogan, mais cela nuit simultanément aussi à la crédibilité et la cohérence de l’engagement de la Suisse pour une politique économique étrangère basée sur les droits humains.

Il appartient maintenant au Parlement de prendre clairement position. Tant qu’aucune amélioration sensible de la situation des droits humains en Turquie (et au nord de la Syrie) n’aura pas été constatée, on doit renoncer à la ratification de l’ALE modernisé.

Ce communiqué est signé par les organisations suivantes :
Alliance Sud, FIAN Suisse, Groupe de travail Suisse-Colombie, Humanrights.ch, Juristes démocrates de Suisse, Public Eye, Schweizerische Helsinki-Vereinigung, Société pour les peuples menacés, Solifonds, Travail.Suisse, Union syndicale suisse (USS).

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